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Coluche, l’histoire d’un mec

17 octobre 2008 2 704 views Aucun commentaire

Coluche, l’histoire d’un mec, film d’Antoine de Caunes avec François-Xavier Demaison dans le rôle titre a fait tristement parler de lui à cause de la polémique Lederman. Je ne reviendrai pas sur cette sombre histoire qui n’est qu’un reflet de plus de l’américanisation de notre société actuelle pour me concentrer sur le film lui-même.

Je craignais le pire en découvrant l’existence d’un film sur Coluche : les biopics sont décidément à la mode en France, après Piaf et Sagan, avant Mesrine. Et puis la performance pure d’un acteur est intéressante mais vite limitée voire désagréable à mon goût. Bref, je ne pensais pas y aller mais le nom d’Antoine de Caunes et une critique positive de Télérama1 m’ont poussé à y aller, et je ne le regrette pas.

En effet, le réalisateur a évité l’écueil traditionnel de ce genre de film qui serait d’en faire une sorte d’hommage mou retraçant l’ensemble de sa vie. Loin de cela, il ne s’intéresse qu’à une très courte période, entre octobre 1980 et mai 1981, soit la période où Coluche s’est présenté aux élections présidentielles. Choisir cette période est très intéressant : c’est à la fois une période où le comique a connu une popularité sans précédent, les sondages lui donnant même 16% d’intentions de vote, mais aussi une période qui révèle les aspects plus noirs du personnage et le film ne les évite pas, bien au contraire. Ainsi, l’idée de l’élection n’était qu’une blague au départ mais très vite, Coluche et son entourage la prennent au sérieux. Et quand les hommes politiques finissent par le prendre au sérieux, ils se dépêchent tous de le descendre en règle. Comme on le sait, Coluche finit par abandonner et laisser la place à Mitterrand. 

Mais on le sent, il aime sa popularité et il cherche à la conserver et à faire parler de lui, allant jusqu’à tricher en mimant une grève de la faim. Par ailleurs, cette proximité soudaine avec le pouvoir le transforme en profondeur ; le film le montre presque parano, et surtout seul, très seul. Coluche était à la fois très entouré (il avait chez lui tous les soirs des dizaines de gens qui faisaient la fête) et très seul : tous ses amis l’abandonnent et sa famille avec. Une bonne idée du film est de le montrer surtout de dos sur scène et on a le sentiment étrange qu’il est comme en retrait dans sa propre vie.

Au fond, si Coluche échoue dans cette campagne, c’est qu’il est trop gentil pour pouvoir faire de la politique. Des critiques, les Inrockuptibles pour ne pas les citer, n’ont pas aimé ce côté “bisounours”. N’ayant pas connu cette époque, je ne sais pas trop qu’en penser, mais c’est vrai que le réalisateur prend le parti de montrer un personnage trop gentil, qui lance une blague potache qui le dépasse rapidement. Il y a des scènes poignantes où, confronté à la misère réelle, Coluche comprend que les gens le prennent au sérieux et il comprend alors qu’il vient de s’engager dans quelque chose de sérieux. Sa gentillesse fait qu’il aimerait vraiment les aider, mais il comprend très vite qu’il en est incapable, ou plutôt qu’on ne le laissera pas le faire. 

Sérieux, c’est le sentiment que l’on a devant ce film sur un comique. Je m’attendais à rire, et l’on ne rit finalement pas vraiment, ou alors d’un rire noir. Non, ce film n’est décidément pas drôle car la tristesse transparaît pleinement derrière ce clown qui ne fait d’ailleurs plus rire sa compagne. On a le sentiment que cette période constitue pour lui une rupture : s’il essaie bien de se réfugier dans les extrêmes, chez lui, on comprend aussi que cela ne fonctionne plus pleinement. Il ne peut ignorer le monde qui l’entoure et il comprend que ce monde veut plus, beaucoup plus, que ses blagues. Le film se termine sur la mention des Restos du cœur qui sont comme une réponse concrète d’un homme qui ne peut plus rire de la misère qu’il constate autour de lui.

 

Ainsi, malgré des critiques globalement négatives, je vous recommande ce film. Peut-être est-ce lié à ma méconnaissance complète de cette époque, mais j’ai trouvé ce film très intéressant, à la fois comme témoin d’une époque et d’un homme. J’ai le sentiment d’avoir plus appris sur Coluche avec ce film qu’avec tous les hommages que j’avais pu lire, entendre ou voir sur le comique. Sans être le film du siècle, Coluche, l’histoire d’un mec s’éloigne suffisamment du biopic traditionnel pour devenir un film intéressant et à voir.

À noter qu’au vu de la fréquentation pour ce film un samedi soir au cœur de Paris, je crois comprendre que le succès n’est pas au rendez-vous et que le film disparaîtra rapidement, d’autant que les sorties à venir sont nombreuses. Donc si vous voulez le voir, n’attendez pas trop !

 

À lire…

 

 

  1. On ne se refait pas… []